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Tribunal du travail d’Afrique du Sud, Chamber of mines of South Africa c. Association of mineworkers of SA, National union of mineworkers, United association of SA, 23 juin 2014, affaire n° J99/14

Pays:
Afrique du Sud
Sujet:
Droit de grève , Négociation collective
Type d’utilisation du droit international:
Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Type d’instruments utilisés:

Instrument non soumis à ratification;1 travaux des organes de contrôle internationaux2 

Négociation collective/ Droit de grève/ Travailleurs non syndiqués/ Lieu de travail/ Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national

Dans cette affaire, la Cour a statué sur le recours formé par l’Association of Mineworkers of SA(Association des mineurs d’Afrique du Sud) contre la décision du Tribunal de première instance, qui a tranché en faveur de la Chamber of Mines of South Africa(Chambre des mines d’Afrique du Sud). Le jugement rendu en première instance a déclaré valide l’extension de la convention collective signée entre la Chamber of Mines, le National Union of Mineworkers (Syndicat national des mineurs) etl’United Association of SA(Association unie d’Afrique du Sud) aux travailleurs non membres de ces organisations. La décision a été prise conformément aux dispositions de l’article 23 (1) d) de la loi relative aux relations de travail qui ont été interprétées comme signifiant que chaque société minière constituait un lieu de travail. L’Association des mineursvoulait que la décision de la Cour reconnaisse qu’étant donné qu’on trouvaitune représentation majoritaire dans cinq mines, un nouveau processus de négociation pouvait être engagé avec la Chambre, à condition que chaque mine représente un lieu de travail indépendant. Par ailleurs, l’Association des mineurs a demandé que la définition du lieu de travail consacrée à l’article 23 de la loi relative aux relations de travail soit déclarée inconstitutionnelle puisqu’elle constituait une restriction injustifiée au droit de grève en refusant aux travailleurs qui étaient membres d’un syndicat et couverts par la convention collective la possibilité d’exercer ce droit.

La Cour a jugé que la définition du lieu de travail consacrée à l’article 23 de la loi était claire et non absurde, abusive ou encore incongrue et, par conséquent, a rejeté la demande principale de l’Association des mineurs. Par rapport à la deuxième demande, la Cour a considéré que, conformément à l’article 23 de la loi relative aux relations de travail, le droit de grève était, par sa nature, sujet à des restrictions; cependant, il s’agissait dans cette affaire de déterminer si les restrictions prévues par la définition du lieu de travail étaient justes et raisonnables. La Cour a jugé que cette limitation trouvait son origine dans une décision politique du législateur d’adopter un modèle précis de négociation collective sur le lieu de travail et que puisqu’il s’agissait d’une décision majoritaire, elle devait être considérée comme légitime. La Cour a ensuite souligné qu’étant donné que la restriction au droit de grève devait, lorsque cela était possible, être conforme aux normes nationales et internationales, la restriction qui faisait l’objet du procès était juste. À cet égard, la Cour a observé que:

« La Commission d’experts de l’OIT pour l’application des conventions et recommandations et le Comité de la liberté syndicaleont interprété les conventions nos 87 et 98 en vue d’inclure le droit de grève  [...] les deux [organes]acceptent comme point de départ le fait que le droit de grève n’est pas absolu et qu’il peut être limité voire interdit dans certaines circonstances.

Selon le paragraphe 142 de l’Etude d’ensemble sur les conventions fondamentales concernant les droits au travail à la lumière de la Déclaration de l’OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable qui a été présenté pendant laConférence internationale du Travail en 2012 : "[…] Si les grèves sont interdites pendant la durée de validité des conventions collectives, cette restriction doit être compensée par le droit de recourir à une procédure d’arbitrage, impartiale et rapide, des griefs individuels ou collectifs concernant l’interprétation ou l’application des conventions."»3

Ensuite, la Cour a indiqué, par rapport à l’extension des conventions collectives, que:

« En ce qui concerne plus particulièrement l’extension des conventions collectives, larecommandation n° 91 de l’OIT sur les conventions collectives, 1951, prévoit à l’article 4 que "les dispositions d'une convention collective devraient être applicables à tous les travailleurs des catégories intéressées employés dans les établissements visés par la convention collective, à moins que la convention collective en question ne prévoie expressément le contraire". Dans son commentaire sur la recommandation n° 91, la commission d’experts a déclaré au paragraphe n° 245 de l’étude d’ensemble que "l’extension des conventions collectives n’est pas contraire au principe de la négociation collective volontaire et n’enfreint pas la convention n° 98."»4

Compte tenu de ce qui précède, la Cour a conclu que la restriction au droit de grève prévue par la définition du lieu de travail consacrée à l’article 23 de la loi relative aux relations de travail n’était pas inconstitutionnelle et que la restriction susmentionnée était compatible avec le principe de liberté syndicale défini par la commission d’experts et le Comité de la liberté syndicale de l’OIT. La Cour a, par conséquent, rejeté la demande de l’Association des mineurs.



2 Commission d’experts de l’OIT pour l’application des conventions et recommandations; Comité de la liberté syndicale de l’OIT.

3 Pages 29 et 30 de la décision.

4 Pages 30 et 31 de la décision.

Texte intégral de la décision