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Tribunal national du travail du Nigeria, Aero Contractors Co. of Nigeria Limited c. National Association of Aircrafts Pilots and Engineers, Air Transport Senior Staff Association of Nigeria et National Union of Air Transport Employees, 4 février 2014, affaire nº NICN/LA/120/2013

Constitution de la République fédérale du Nigeria

Article 12, paragraphe 1

Aucun traité entre la Fédération et tout autre pays n’aura force de loi tant qu’il n’aura pas été incorporé sous forme de loi par l’Assemblée nationale. 

Constitution de la République fédérale du Nigeria (troisième révision) de 2010 

254 C- (1)

Nonobstant les dispositions des articles 251, 257, 272 et toute autre disposition contenue dans la présente Constitution, et en addition à toute autre juridiction qui aurait pu lui être conférée par un acte de l’Assemblée nationale, le Tribunal national du travail exercera la juridiction exclusive et aura la primauté sur les autres cours en matière civile (…)

(h) liées ou attenant à l’application ou l’interprétation des normes internationales du travail;

(2) nonobstant toute mention contraire dans la présente Constitution, le Tribunal national du travail détient la juridiction et le pouvoir de connaître de toute affaire liée ou attenant à l’application des conventions, traités ou protocoles internationaux ratifiés par le Nigeria et concernant le travail, l’emploi, le lieu de travail, les relations professionnelles ou des sujets connexes.

Pays:
Nigeria
Sujet:
Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Résolution directe du litige sur le fondement du droit international
Type d’instruments utilisés:

Travaux des organes de contrôle internationaux1 

Droit de grève/ Services essentiels/ Transport aérien/ Résolution directe du litige sur le fondement du droit international

La société Aero Contractors Co. of Nigeria Limited, qui se consacrait au transport de passagers et de marchandises, demanda au Tribunal industriel du Nigeria de déterminer si les membres des syndicats National Association of Aircrafts Pilots and Engineers, Air Transport Senior Staff Association of Nigeria et National Union of Air Transport Employees avaient le droit d'appeler à la grève et de faire grève. La société fit valoir que, conformément à la Loi sur les syndicats de 2004, le transport de passagers et de marchandises était un service essentiel et que les droits des membres des syndicats défendeurs étaient donc restreints par cette même loi.

Dans leur défense, les syndicats soutinrent que conformément au Comité de la liberté syndicale de l'OIT, l'interdiction de grève dans un service essentiel n'était acceptable que lorsqu'il existait un risque imminent pour la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans l’ensemble ou dans une partie de la population, et que ces critères n'étaient pas réunis dans cette affaire.

Les syndicats considérèrent également que l'interdiction de grève enfreignait les droits d'association et de négociation collective, en contradiction avec les dispositions des Conventions no 87 et no 98 de l'OIT. La société contesta l'application de ces conventions au motif qu'en l'absence d'une loi introduisant les dites conventions dans le système juridique national, celles-ci n'avaient pas force de loi.

Dans son analyse, le Tribunal a conclu que, contrairement à ce qu'avait déclaré la Société, la section 245C de la Constitution lui conférait les compétences et les pouvoirs d'appliquer n'importe quelle convention internationale ratifiée par le Nigeria.

Ensuite, le Tribunal s’est référé aux observations du Comité de la liberté syndicale de l’OIT et a observé que:

« Conformément aux orientations du Comité de la liberté syndicale inscrites dans le Recueil de décisions et de principes du-dit organisme, quatrième édition, paragraphe 131, page 29, « Le droit de grève et celui d’organiser des réunions syndicales sont des éléments essentiels du droit syndical » ».2

Afin de déterminer si le transport aérien est un service essentiel, le Tribunal s'est référé aux travaux de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de l'OIT, en notant que:

« … la Commission d’experts définit comme services essentiels ceux « dont l’interruption risquerait de mettre en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans l’ensemble ou dans une partie de la population ».

.... Ces services sont: Le secteur hospitalier, les services d’électricité, les services d’approvisionnement en eau, les services téléphoniques et les services de contrôle du trafic aérien...La Commission considère au contraire, de façon générale, que les services suivants ne sont pas des services essentiels et que l'interdiction de grève ne s'y applique pas: La réparation aéronautique... les transports en général »3.

En interprétant la loi sur les syndicats à la lumière des travaux de la Commission d'experts et du Comité de la liberté syndicale de l’OIT, le Tribunal a conclu que les membres des syndicats défenseurs avaient le droit de faire grève puisqu'ils ne fournissaient pas de services essentiels. Toutefois, si un membre remplissait des fonctions de contrôle du trafic aérien, l'interdiction de grève s'appliquerait à lui.



1 Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de l'OIT ; Comité de la liberté syndicale de l'OIT.

2 Page 18 de la décision.

3 Page 19 de la décision.

Texte intégral de la décision