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Cour suprême du Bangladesh, BNWLA c. Gouvernement du Bangladesh, 14 mai 2009, requête n° 5916 de 2008

Pays:
Bangladesh
Sujet:
Harcèlement sexuel
Type d’utilisation du droit international:
Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Type d’instruments utilisés:

Traité ratifié;1 travaux des organes de contrôle internationaux;2 jurisprudence étrangère.3

Harcèlement sexuel / Lacunes dans la législation nationale/ Utilisation du droit international pour interpréter les droits constitutionnels et déterminer les règles applicables au harcèlement sexuel

À la suite de rapports faisant état de faits de harcèlement sexuel, la Bangladesh National Women Lawyers Association (BNWLA) déposa devant la Cour suprême un recours contre le gouvernement du Bangladesh. Après avoir constaté l’absence de dispositions législatives spécifiques pour lutter contre le harcèlement sexuel à l’encontre des femmes et des fillettes, la Cour conclut qu’il fallait s’attaquer d’urgence à ce problème. La Cour invoqua la responsabilité qui lui incombait en vertu de l’art. 102 de la Constitution, de faire respecter les droits fondamentaux en l’absence de législation. La Cour suprême définit donc le « harcèlement sexuel » et fixait des directives sous forme de lignes directrices afin de protéger les femmes et les petites filles contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail et dans les établissements d’enseignement dans les secteurs public et privé « à suivre et respecter … jusqu’à ce qu’une législation adéquate soit adoptée dans ce domaine. » Pour formuler ces directives, la Cour se basa sur différents témoignages de harcèlement sexuel, ainsi que sur les dispositions constitutionnelles, les instruments internationaux et la jurisprudence étrangère.

Plus précisément, la Cour se référa aux articles 19 (1), 26, 29 et 31 de la Constitution et observa que le principe de l’égalité des sexes inscrit dans la Constitution englobe la prévention du harcèlement sexuel, en particulier si les dispositions pertinentes sont lues à la lumière du droit international:

« Les droits fondamentaux (...) sont suffisants pour englober tous les éléments de l’égalité des sexes, y compris la prévention du harcèlement ou des abus sexuels. (...) Les conventions et normes internationales doivent être intégrées dans les droits fondamentaux en l’absence de toute législation nationale occupant le terrain quand il n’y a pas de contradiction entre elles. Il est maintenant une règle acceptée en interprétation judiciaire que le droit national doit être interprété en conformité avec la législation et les conventions internationales lorsqu’il n'y a pas d'incompatibilité entre elles ou quand il y a un vide juridique dans le droit national. La protection contre le harcèlement sexuel et le droit à l’éducation et au travail dans la dignité sont reconnus universellement comme des droits humains fondamentaux. »

S’appuyant sur la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et son Protocole facultatif et sur la Recommandation générale n° 19 sur la violence contre les femmes du Comité des Nations Unies sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, qui considère que « (17) [l]’égalité dans l'emploi peut être gravement compromise lorsque les femmes sont soumises à la violence fondée sur le sexe, tel le harcèlement sexuel sur le lieu de travail », la Cour formula onze règles qui doivent servir de lignes directrices. Celles-ci contiennent une définition du harcèlement sexuel et fixent les mesures à adopter, notamment en matière de sensibilisation du public, de procédures de plainte et de sanctions.


1 Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, 1979.

2 Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.

3 Canada, Inde.

Texte intégral de la décision