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Cour suprême de justice, Chambre du travail, Carbones de la Jagua S.A. c. Sindicato Nacional de Trabajadores de la Industria Minera Petroquímica y Agrocombustible y Energética (SINTRAMIENERGÉTICA), 10 avril 2013, affaire n° 57731

Constitution nationale de Colombie

Article 53

(...) Les conventions internationales du travail, dûment ratifiées, font partie de la législation nationale (…).

Article 93, paragraphe 1

Les traités et conventions internationaux, ratifiés par le Congrès, reconnaissant les droits de l’homme et interdisant leur limitation lors des états d’exception, prévalent dans l’ordonnancement juridique interne.

Les droits et devoirs consacrés dans cette Charte s’interprètent conformément aux traités internationaux sur les droits de l’homme ratifiés par la Colombie.

Pays:
Colombie
Sujet:
Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Type d’instruments utilisés:

Traités ratifiés1; travaux des organes de contrôle internationaux2

Droit de grève/ Exercice du droit de grève limité aux actions de grève pacifique/ Recours à la violence/ Négociation collective/ Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national

Le plaignant a entamé une poursuite judiciaire demandant à la Cour de juger comme illégal l’arrêt de travail initié par le syndicat, avançant que ce dernier avait utilisé la violence lors de la cessation du travail et, de fait, violé l’interdiction du recours à la violence ainsi que le prévoit l’article 450 f) du Code  du travail.3 Le plaignant a expliqué qu’au terme de la négociation collective, qui n’avait abouti à aucun accord direct entre le syndicat et la société, le syndicat avait déclenché une grève hors de la présence des autorités du travail et avait eu recours à la violence pour bloquer l’entrée de l’entreprise et empêcher l’exécution des tâches essentielles au bon fonctionnement de celle-ci. Le syndicat a nié avoir eu recours à la violence, mais a reconnu avoir barré la route pour empêcher que la grève ne soit entravée par la société.

La Cour suprême de justice s’est référée aux dispositions de la législation nationale et à la jurisprudence, indiquant que le droit de grève faisait partie intégrante du système constitutionnel du droit collectif au travail renforcé par les conventions nos 87 et 98 de l’OIT qui s’inscrivent dans le bloc de constitutionnalité. Toutefois, conformément au champ d’application du droit de grève établi par la jurisprudence de la Cour constitutionnelle, ce dernier ne constitue ni un droit fondamental dans la mesure où son application est soumise à une réglementation, ni un droit absolu – mais bien un droit relatif – étant donné qu’il est sujet à des restrictions telles que sa pratique pacifique.

La Cour s’est ensuite référée aux recommandations du Comité de la liberté syndicale relatives aux piquets de grève dans le recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du BIT. À cet égard, la Cour a observé que :

« En effet, la législation nationale s’appuie sur les principes et recommandations du Comité de la liberté syndicale du BIT et, plus particulièrement, sur les recommandations consacrées dans les paragraphes 649, 650 et 651 relatifs aux piquets de grève qui stipulent qu’une grève ne se justifie que si elle revêt un caractère pacifique (649) et si les travailleurs se limitent à inciter de manière pacifique les non-grévistes à ne pas rejoindre leur poste de travail (651), interdisant, de fait, toute action dont le but est de "troubler l’ordre public et de menacer les travailleurs qui poursuivraient leurs occupations" (650) ou toute action qui "s’accompagne de violences ou d’entraves à la liberté du travail par contrainte exercée sur les non-grévistes" (651), tandis que le paragraphe 667 indique clairement que " les principes de la liberté syndicale ne protègent pas les abus dans l’exercice du droit de grève qui constituent des actions de caractère délictueux" ».

En outre, la Cours a considéré que:

(…) Le Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du BIT énonce dans les paragraphes 324 et 325 de son 323e rapport4 que "l’occupation de plantations par des travailleurs et d’autres personnes (…) est contraire à l’article 8 de la convention n° 87" ».

Compte tenu de ce qui précède, la Cour a estimé que, à la lumière de la Constitution, de la jurisprudence et des recommandations du Comité de la liberté syndicale du BIT, il n’y avait aucune « définition ouverte » de la grève qui autorise l’occupation du lieu de travail et encore moins le recours à la violence. Par conséquent, la Cour a jugé que la grève, objet du présent litige, était illégale.


1 Convention (n° 87) de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; convention (n° 98) de l’OIT sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

2 Comité de la liberté syndicale.

3 Article 450. ACTIONS DE CARACTÈRE DÉLICTUEUX ET SANCTIONS. 1. L’arrêt de travail est illégal dans les cas suivants (…) f) Lorsque la grève perd son caractère pacifique. 

4 Rapport du Comité de la liberté syndicale (n° 323) G 279/8, 279e session de novembre 2000, cas n° 2021.

Texte intégral de la décision