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Cour constitutionnelle, 18 octobre 2000, cas n° 1-36/2000

Constitution de l’Ukraine

Article 9

Les traités internationaux en vigueur et reconnus comme contraignants par le Verkhovna Rada (Parlement) de l’Ukraine font partie de la législation nationale de l’Ukraine.

La conclusion de traités internationaux qui contreviendraient à la Constitution Ukrainienne est possible seulement après avoir introduit les amendements pertinents à la Constitution de l’Ukraine.

Loi sur les traités internationaux de l’Ukraine1

Article 17, paragraphes 1 et 2

1)   Les traités internationaux conclus et ratifiés par l’Ukraine  constituent une partie inséparable de la législation nationale ukrainienne et seront appliqués de manière identique aux dispositions de la législation nationale.

2)   Si un traité ratifié par l’Ukraine par le biais d'une loi contient des règles autres que celles établies par la législation ukrainienne, les règles du traité international s’appliqueront.


1Loi sur les traités internationaux de l’Ukraine du 22 décembre 1993.

Pays:
Ukraine
Sujet:
Liberté syndicale
Type d’utilisation du droit international:
Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Type d’instruments utilisés:

Traités ratifiés1

Loi restreignant la possibilité de créer plus d’un syndicat au niveau local et provincial et subordonnant la reconnaissance des nouvelles organisations à un contrôle du Ministère de la justice/ Action en inconstitutionnalité/ Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national

De nombreux parlementaires ukrainiens ainsi que «l’Ombudsman des droits de l’homme du Conseil suprême» intentèrent une action en inconstitutionnalité contre la loi sur les syndicats venant d’être adoptée par le Parlement, alléguant que le texte violait non seulement les articles de la Constitution ukrainienne reconnaissant la liberté syndicale mais également la convention n° 87 de l’OIT ainsi que le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, tous deux ratifiés par l’Ukraine.

Les requérants contestaient en premier lieu la constitutionnalité de l’article 11 de la loi posant les conditions de création des syndicats au niveau local, provincial et national. En vertu de cet article, pour obtenir la personnalité juridique, les syndicats locaux étaient tenus de compter en leur sein au moins trois sections syndicales de base ou au moins neuf membres travaillant dans des entreprises différentes. Il découlait de cette disposition que les associations de travailleurs implantées dans un seul établissement ne se voyaient pas reconnaître la personnalité juridique et devaient nécessairement s’affilier à un syndicat plus vaste. Etaient également contestées les dispositions de l’article 11 n’accordant le statut de syndicats provinciaux qu’aux seules organisations réunissant la majorité des affiliés syndicaux existants dans une branche ou une région. Les requérants alléguaient que ces dispositions interdisaient le pluralisme syndical au niveau provincial.

Finalement, les requérants contestaient également la validité de l’article 16 de la loi relative à la procédure d’enregistrement des syndicats. En vertu de cette disposition, l’enregistrement de l’organisation par le Ministère de la justice constituait une condition préalable à l’obtention de la personnalité juridique, le ministère pouvant refuser l’enregistrement s’il estimait que les règles de l’article 11 précité n’étaient pas respectées.

La Cour se fonda tout d’abord sur les articles 36 et 37de la Constitution nationale reconnaissant la liberté syndicale. Elle considéra que ces dispositions protégeaient le pluralisme syndical et que celui-ci était sérieusement mis à mal par l’article 11 de la loi faisant l’objet du recours. La juridiction constitutionnelle estima ensuite que l’article 16 du texte avait pour effet de subordonner la création des syndicats à une autorisation préalable, condition expressément prohibée par la Constitution.

Pour renforcer son raisonnement, la Haute juridiction releva que les dispositions faisant l’objet du litige étaient également contraires à la convention n° 87 de l’OIT et au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. La Cour signala que les garanties inclues dans ces deux instruments avaient été entièrement intégrées dans la Constitution nationale. À cet égard, la Cour s’exprima de la manière suivante:

«La substance des dispositions de ces traités internationaux a été incorporée dans le texte de la Constitution ukrainienne, en particulier dans les articles 36 et 37, qui contiennent des protections et garanties similaires concernant l’exercice par les citoyens de leur droit à la liberté d’association, y compris au sein d’organisations syndicales. Au vu du fait que certaines dispositions de la loi apparaissent inconstitutionnelles dans la mesure où elles violent le droit des citoyens à la liberté d’association, la Cour constitutionnelle d’Ukraine note à cet égard que les exigences posées par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et la convention n° 87 de l’OIT n’ont pas été adéquatement incorporés dans le texte législatif.»

En s’appuyant à la fois sur le texte de sa Constitution et sur les dispositions des traités internationaux pertinents, la Cour constitutionnelle d’Ukraine prononça l’inconstitutionnalité des articles de la loi sur les syndicats ayant donné lieu au litige.


1 Convention (n° 87) de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, 1966.

Texte intégral de la décision