Tribunal industriel du Botswana, Sarah Diau c. Botswana Building Society, 19 décembre 2003, n° IC 50/2003
Botswana
Licenciement , Protection contre la discrimination dans l’emploi et la profession
Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Traité ratifié;1 instrument non soumis à ratification2
Statut VIH dans le cadre de l’examen médical/ Licenciement/ Respect de la vie privée/ Protection de la dignité humaine/ Référence au droit international pour renforcer une décision basée sur le droit interne
En février 2002, la demanderesse s’est vu offrir un emploi d’assistante en sécurité assorti d’une période d’essai de six mois auprès de la Building Society, la défenderesse. L’offre stipulait que le contrat permanent dépendrait des résultats de l’examen médical effectué par un médecin choisi et payé par la Building Society. La demanderesse est entrée en fonction un peu plus tard dans le mois et a reçu en août suivant une demande écrite émanant de la Building Society et l’invitant à produire dans le cadre de l’examen médical un document certifié relatif à son statut VIH. La demanderesse a répondu par courrier et signifié son refus de produire un tel document: «À ce que je sache, le statut VIH relève de la vie privée et ne constitue pas une exigence liée à l’emploi». En octobre 2002, la demanderesse a reçu de la Building Society une lettre l’informant qu’elle ne se verrait pas offrir de contrat permanent. Aucune raison n’était donnée pour son licenciement.
Dans son mémoire, la demanderesse requiert «sa réintégration et une indemnisation pour licenciement abusif», y compris:
- une ordonnance déclarant l’illégalité de l’instruction donnée par la défenderesse à la demanderesse de se soumettre à un test VIH parce qu’elle viole le droit constitutionnel de la demanderesse à la vie privée;
- une ordonnance déclarant que la décision de la défenderesse de résilier le contrat de travail de la demanderesse pour la raison qu’elle pourrait être atteinte du VIH constitue une discrimination sur la base du handicap et que cette discrimination constitue un refus de l’égalité de protection légale consacrée par la Constitution, ainsi qu’un traitement inhumain et dégradant;
- une ordonnance déclarant que la non-prestation de conseils avant et après le test par la défenderesse constitue un traitement dégradant;
- une ordonnance imposant à la défenderesse de réintégrer la demanderesse et de lui verser une indemnité équivalente à six mois de salaire.
En l’absence de réglementation en matière de VIH/SIDA et d’emploi, le Tribunal a estimé qu’en tant que texte juridique suprême, la Constitution était pertinente pour l’examen des questions liées au VIH/SIDA sur le lieu de travail dans la mesure où elle garantit à chaque citoyen l’égalité devant la loi, l’égalité de protection légale et le respect de la dignité humaine et qu’elle interdit la discrimination.
Le Tribunal a également relevé que la politique nationale en matière de VIH/SIDA aborde ces questions et qu’elle est en conformité avec les directives internationales. Le Tribunal a estimé que l’élimination de la discrimination et la promotion de la non-discrimination sont des objectifs essentiels de cette politique et qu’elles donnent effet aux obligations internationales du Botswana. Le Tribunal a observé que le principe constitutionnel d’élimination de la discrimination sur le lieu de travail est en conformité avec la Déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail. Il l’a également jugé conforme aux valeurs défendues par la convention (n° 111) de l’OIT, que le Botswana a ratifiée. Enfin, le Tribunal a noté que les dispositions correspondantes doivent être prises en considération lors de l’interprétation de dispositions fondamentales similaires en vertu de la Constitution.
Se référant aux dispositions des chapitres 3(a) et 7(1) de la Constitution du Botswana, le Tribunal a conclu que l’obligation de produire un document sur la statut VIH constitue une violation du droit à la liberté et que la résiliation du contrat était abusive et illégale.
Le Tribunal a ordonné la réintégration et l’indemnisation de la demanderesse.