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Tribunal du travail de première instance d’Antananarivo en chambre du conseil, 11 avril 2013, sentence arbitrale n° 2

Constitution de la République de Madagascar

Préambule

(...) Considérant sa situation géopolitique dans la région et sa participation engagée dans le concert des nations et faisant siennes:

- la Charte internationale des droits de l’homme;

- la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples;

- les Conventions relatives aux droits de la femme et de l’enfant, qui sont toutes considérées comme partie intégrante de son droit positif; (...)

 Article 82, paragraphe 3.VIII

(...) Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie.

Pays:
Madagascar
Sujet:
Protection contre la discrimination dans l’emploi et la profession
Type d’utilisation du droit international:
Résolution directe du litige sur le fondement du droit international
Type d’instruments utilisés:

Traités ratifiés;1 instrument non soumis à la ratification2

Conflit collectif/ Interprétation de la sentence arbitrale mettant fin au litige/ Discrimination antisyndicale / Résolution directe du litige sur le fondement du droit international

Suite à une première sentence arbitrale mettant fin au conflit collectif opposant la BFV Société Générale et ses employés, le Tribunal de première instance d’Antananarivo fut à nouveau saisi d’une requête en interprétation de cette sentence qui, entre autres mesures, fixait les taux d’intérêts préférentiels applicables aux prêts personnels ordinaires (PPO) et aux prêts personnels immobiliers (PPI) contractés auprès de la banque par ses employés. Le syndicat du personnel de la banque reprochaient en effet à l’employeur de n’appliquer ces taux préférentiels qu’aux nouveaux contrats de prêts conclus à compter du prononcé de la première sentence arbitrale, datant du 14 mars 2013, et donc d’en exclure l’application pour les contrats de prêts en cours. Selon le syndicat, une telle mesure constituait en réalité une discrimination à l’égard des salariés ayant participé au conflit collectif. Il appelait donc à l’application des taux préférentiels sans distinction sur la base de la date de conclusion du contrat de prêt.

Dans un premier temps, le tribunal invoqua plusieurs sources. Il rappela tout d’abord le principe de la lutte contre les inégalités et la discrimination sous toutes ses formes, érigé en principe général de droit par la Constitution. Il s’appuya ensuite sur les conventions n° 111, 100 et 87 de l’OIT, ratifiées par Madagascar, ainsi que sur la Déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail de 1998, dont il déclara qu’elles « sont d’application automatique » dans l’ordre juridique interne.3

Se référant à la définition du terme « discrimination » énoncé par la convention n° 111, le tribunal constata que les salariés de la banque souhaitant contracter un prêt étaient tous dans la même situation, qu’ils aient été nouvellement recrutés ou non et que la conclusion du contrat de prêt soit antérieure ou postérieure au prononcé de la première sentence arbitrale. Le tribunal poursuivit en soulignant « qu’au sens de la convention n° 87, le recours au critère de la date pour refuser l’octroi de l’avantage des taux préférentiels aux salariés en fonction au moment du conflit collectif constitue à la fois un acte de discrimination antisyndicale et une mesure indirecte de représailles à l’encontre des travailleurs qui ont participé à la grève dont l’objet était des revendications professionnelles légitimes ».4 Assimilant par ailleurs les PPO et PPI à des « avantages qui se greffent au salaire, dans la mesure où ils contribuent à l’amélioration du pouvoir d’achat de l’employé », le tribunal en conclut dès lors que « aucun traitement discriminatoire ne [devait] se faire » et que la sentence arbitrale « s’appliqu[ait] aussi bien aux contrats de prêts en cours pour les restants dus à compter du mois de janvier 2013 et à tout contrat à venir ».5

 


1 Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958; Convention (n° 100) sur l'égalité de rémunération, 1951; Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948

2 Déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail de 1998.

3 Page 3, considérant n° 3.

4 Page 4, considérant n° 5.

5 Page 5.

Texte intégral de la décision