Tribunal de première instance de Sidi Slimane, Mounir Ouharro C. c. Ismaïl Alaoui, 25 mai 2005, n° 58/2005
Constitution du Royaume du Maroc
Préambule
(...) Conscient de la nécessité d’inscrire son action dans le cadre des organismes internationaux, dont il est un membre actif et dynamique, le Royaume du Maroc souscrit aux principes, droits et obligations découlant des Chartes des dits organismes et réaffirme son attachement aux droits de l’Homme tels qu’ils sont universellement reconnus. (...)
Article 31, paragraphe 3
Les traités susceptibles de remettre en cause les dispositions de la Constitution sont approuvés selon les procédures prévues pour la réforme de la Constitution.
Code du travail du Royaume du Maroc
Préambule du Code du travail
La présente législation du travail se caractérise par sa conformité avec les principes de bases fixés par la constitution et avec les normes internationales telles que prévues dans les conventions des Nations Unies et de ses organisations spécialisées en relation avec le domaine du travail.
(...)
Les droits protégés et dont l’exercice, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’entreprise, est garanti par la présente loi comprennent les droits contenus dans les conventions internationales du travail ratifiées d’une part, et les droits prévus par les conventions principales de l’organisation internationale du travail, qui comprennent notamment: a) la liberté syndicale et l’adoption effective du droit d’organisation et de négociation collective; b) l’interdiction de toutes formes de travail par contrainte; c) l’élimination effective du travail des enfants; d) l’interdiction de la discrimination en matière d’emploi et de professions; e) l’égalité des salaires.
(...)
En cas de contradiction entre les textes de loi, la priorité est donnée à l’application de ceux qui sont les plus avantageux pour les salariés.
Lors de la procédure du règlement des conflits du travail individuels ou collectifs, sont pris en considération dans l’ordre:
I. Les dispositions de la présence loi, les conventions et chartes internationales ratifiées en la matière;
II. Les conventions collectives;
III. Le contrat de travail;
IV. Les décisions d’arbitrage et les jurisprudences; (…)
Maroc
Licenciement
Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Traité ratifié1
Licenciement d’un salarié sans motif valable/ Preuve de l’abandon du poste à la charge de l’employeur/ Le seul irrespect de la procédure de licenciement et notamment de l’audition du salarié est constitutif d’abus de droit/ Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Les faits se rapportent au renvoi définitif d’un travailleur au terme de 3 années de travail dans une entreprise de service téléphonique. Le salarié alléguait un licenciement abusif en raison de l’absence de motif valable et de l’inobservation des conditions de forme prévues par le Code de travail pour le licenciement d’un travailleur. Outre les dommages intérêts, il réclamait le paiement de la différence entre les salaires reçus et ceux qu’il aurait dû percevoir par application du taux du salaire minimum légal, ainsi que l’indemnité de licenciement, la prime d’ancienneté et diverses autres indemnisations pour compenser les congés et absences payées dont il aurait été privé et la perte d’emploi. Le Tribunal a retenu le caractère abusif du licenciement et donné droit à la plupart de ces demandes, sur la base des dispositions du Code du travail dont il renforce la portée par référence à la convention de l’OIT n° 158 sur le licenciement.
Plus précisément, le défendeur a soutenu, que l’intéressé qui a travaillé pour son compte à titre temporaire, aurait détourné des fonds de la caisse de la «téléboutique» et aurait volontairement abandonné son poste à la suite de la découverte de ce forfait et du dépôt d’une plainte à son encontre auprès du parquet. Il conteste, en conséquence, la qualification de rupture abusive du contrat de travail et requiert du Tribunal, à titre principal le sursis à statuer jusqu’à l’aboutissement de la plainte au pénal et à titre accessoire, le rejet de la demande pour défaut de base légale et de fondement sérieux.
Au terme de l’enquête sociale qu’il a diligenté, le Tribunal a estimé que l’existence d’une relation salariée continue entre les parties ainsi que sa rupture sont matériellement établis. Au sujet de l’allégation de l’abandon du poste il a rappelé que selon le code du travail, il incombe à l’employeur d’en apporter la preuve. Il a estimé que le caractère abusif du licenciement est établi par la seule inapplication de la procédure légale qui prévoit notamment, la notification écrite du renvoi pour faute grave dans les 48 heures de la décision et l’audition préalable du travailleur. Il réfère à ce propos aux dispositions du Code du travail et de la convention n° 158 de l’OIT en ces termes:
«Attendu que l’allégation d’abandon volontaire de travail doit être établie par l’employeur selon l’article 63 § 2, ce que le défendeur n’a pas fait; quant à la faute grave prétendument commise par le salarié selon le défendeur, elle aurait due être suivie d’un licenciement disciplinaire selon les dispositions de l’article 61 du code du travail, ce qui aurait par ailleurs, donné au salarié l’occasion se défendre au moyen de son audition conformément à l’article 62. De même l’article 63 prévoit la notification écrite du licenciement au travailleur dans les 48 heures de la date de prise de décision, ce qui n’a pas été fait par le défendeur; il en découle le défaut de base légale à ce licenciement quand bien même le salarié aurait commis le vol allégué, dès lors que les modalités de licenciement précitées n’ont pas été respectées.
Attendu qu’il convient de signaler à ce titre, que les dispositions du code du travail susmentionnées sont confortées par la convention de l’OIT n° 158 sur le licenciement, ratifiée par le Maroc en date du 7 Octobre 1993 qui déclare dans son article 4 qu’ «un travailleur ne devra pas être licencié sans qu’il existe un motif valable de licenciement lié à l’aptitude ou à la conduite du travailleur ou fondé sur les nécessités du fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service», et affirme à l’article 7 qu’un travailleur ne devra pas être licencié pour des motifs liés à sa conduite ou à son travail avant qu’on ne lui ait offert la possibilité de se défendre contre les allégations formulées à son encontre.»
Sur le fondement du Code du travail conforté par la référence à la convention n° 158 de l’OIT, le Tribunal de Sidi Slimane a donc considéré qu’en l’absence d’entretien préalable et de notification écrite de la rupture, le licenciement du salarié devait être considéré comme abusif.