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Cour suprême de l’Inde, Mackinnon Mackenzie c. Audrey D’Costa et autre, 26 mars 1987, [1987] 2 SCC 469

Pays:
Inde
Sujet:
Egalité de rémunération , Protection contre la discrimination dans l’emploi et la profession
Type d’utilisation du droit international:
Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Type d’instruments utilisés:

Traité ratifié;1 jurisprudence étrangère;2 jurisprudence internationale.3

Egalité de rémunération/ Différences de rémunération entre les sténographes femmes et leurs collègues de sexe masculin/ Référence à la convention n° 100 de l’OIT comme règle applicable en l’espèce/ Interprétation du droit national à la lumière de la convention n° 100 de l’OIT

Une sténographe avait, une fois son contrat de travail achevé, contesté le système de rémunération de son entreprise en arguant d’une discrimination entre les femmes et les hommes. Cette discrimination avait déjà été reconnue par trois juridictions. L’entreprise a saisi la Cour suprême pour faire annuler les dispositions prises en faveur de Mme D’Costa. La sténographe occupait un poste dit de confiance à l’intérieur de la société. Le problème résidait dans le fait qu’aucun homme n’occupait une fonction similaire. Cependant, il avait été reconnu que, pour un même travail, un sténographe de sexe masculin aurait été mieux rémunéré.

La Cour a d’abord estimé que la convention n° 100 de l’OIT était une des sources de droit applicables au litige:

«Avant de traiter du contentieux entre les parties, il est nécessaire de mentionner les dispositions légales régissant le cas. L’article 39 d) de la Constitution prévoit que l’État doit, en particulier, diriger sa politique de façon à assurer une rémunération égale pour un travail égal, aussi bien pour les hommes que pour les femmes. La Convention sur l’égalité de rémunération a été adoptée par la conférence générale de l’Organisation internationale du Travail le 29 juin 1951. L’Inde est un des États parties à cette convention.»

Après avoir cité l’article 2 de la convention n° 100 de l’OIT,4 la Cour s’est ensuite attachée à décrire la situation juridique des pays européens en matière d’égalité de rémunération:

«En Angleterre, la loi de 1970 sur l’égalité de rémunération a donné effet à cette convention. Presque tous les pays de la Communauté économique européenne ont signé cette convention. Le traité de la communauté économique européenne prévoyait également que pendant une première période (jusqu’au 31 décembre 1961), chaque État membre devait assurer et ensuite maintenir l’application du principe selon lequel les hommes et les femmes devaient recevoir une rémunération égale pour un travail égal.»

La Cour, dans son examen de la jurisprudence européenne a noté:

«Dans un (…) cas concernant la rémunération d’une femme demandant la même rémunération que son prédécesseur, un homme, la Cour européenne a décidé que le principe d’égalité de rémunération n’était pas limité aux cas où les femmes et les hommes étaient employés de façon contemporaine, mais s’appliquait aussi quand une femme recevait une rémunération inférieure à celle d’un homme ayant occupé précédemment un emploi de même valeur.»

En interprétant la législation nationale à la lumière de la convention n° 100 de l’OIT et de la pratique jurisprudentielle européenne en la matière, la Cour suprême de l’Inde a pu estimer que Mme D’Costa avait bénéficié d’une rémunération moins importante que ses collègues masculins exerçant un travail de valeur égale. Le fait qu’aucun homme n’occupait la même fonction dans la société n’était pas pertinent puisque le principe d’égalité de rémunération ne suppose pas seulement d’assurer un même niveau de rémunération à des personnes exerçant des fonctions identiques, mais également à des personnes exerçant des travaux différents mais considérés comme de valeur égale. La Cour a refusé d’annuler les dispositions correctrices prises en faveur de Mme D’Costa.


2 Angleterre.

3 Cour de justice de l’Union Européenne.

4 Article 2 de la convention n° 100:

«1. Chaque Membre devra, par des moyens adaptés aux méthodes en vigueur pour la fixation des taux de rémunération, encourager et, dans la mesure où ceci est compatible avec lesdites méthodes, assurer l’application à tous les travailleurs du principe de l’égalité de rémunération entre la main-d’oeuvre masculine et la main-d’oeuvre féminine pour un travail de valeur égale.

2. Ce principe pourra être appliqué au moyen:

a) soit de la législation nationale;

b) soit de tout système de fixation de la rémunération établi ou reconnu par la législation;

c) soit de conventions collectives passées entre employeurs et travailleurs;

d) soit d'une combinaison de ces divers moyens.»

Texte intégral de la décision