en
fr
es

Cour suprême de justice, Chambre constitutionnelle, Antonio Blanco Rodríguez et autres c. le Président de la République, le Ministre du gouvernement et de la politique, l’Institut de développement agricole et la Commission nationale pour les questions indigènes, 11 août 1999, décision n° 06229-aa

Constitution du Costa Rica

Article 7, paragraphe 1

Les traités publics, accords internationaux et concordats régulièrement approuvés par l’Assemblée législative auront une autorité supérieure à celle des lois internes, à partir du moment de leur entrée en vigueur ou à partir du jour fixé par la loi.

Pays:
Costa Rica
Sujet:
Peuples indigènes et tribaux
Type d’utilisation du droit international:
Résolution directe du litige sur le fondement du droit international
Type d’instruments utilisés:

traités ratifiés1

Droits des peuples indigènes et tribaux/ Droit de propriété/ Application directe du droit international pour écarter une disposition nationale de rang inférieur

Les habitants d’une réserve indigène dont la superficie avait été réduite par décret avaient déposé un recours en protection de leurs droits fondamentaux (recurso de amparo) pour dénoncer la violation de leurs droits territoriaux. Pour déterminer si la diminution de la taille de la réserve indigène, décrétée par l’Exécutif, violait les droits fondamentaux des requérants, la Chambre constitutionnelle de la Cour suprême s’est appuyée sur les dispositions de la convention n° 107 de l’OIT après avoir considéré que la Constitution nationale ne contenait que des dispositions générales en matière de propriété. En vertu de cette convention, les États signataires ont entre autres l’obligation d’adopter des mesures de protection en faveur des biens des populations indigènes, ainsi que de reconnaître le droit de propriété de ces dernières sur les terres qu’elles occupent traditionnellement.

La Cour a considéré que le décret de l’Exécutif, en réduisant la taille de la réserve d’indigènes, était incompatible avec la convention n° 107 de l’OIT en ce qu’il portait atteinte au droit de propriété des populations indigènes protégé par ledit instrument international.

La Chambre s’est prononcée de la manière suivante:

«Le décret n° 7962 dispose dans son article 1er que sont modifiées les limites de la Réserve indigène de Guatuso. Cette réduction de la taille de la Réserve indigène de Guatuso d’une superficie d’environ 250 hectares modifie ainsi le décret 5904-G du 10 avril 1996. Cela enfreint l’interdiction contenue dans la loi n° 6172 en vigueur depuis le 20 décembre 1977.

(…) Au moment d’adopter le décret en question, la convention n° 107 relative à la protection et à l’intégration des populations aborigènes et autres populations tribales et semi-tribales2 était en vigueur et avait été dûment adoptée par l’Assemblée législative du Costa Rica, par la loi n° 2330 du 9 avril 1959. Cette convention, conformément à l’article 7 de la Constitution, a un rang supérieur à la loi et par conséquent au décret de réforme. (…)

L’article 11 de la convention en question prévoit le devoir de l’État de reconnaître le droit de propriété collectif ou individuel, en faveur de ceux qui constituent les populations indigènes, sur les terres traditionnellement occupées par ces dernières (…) Ces territoires, traditionnellement occupés par ces groupes, ont été reconnus par l’État du Costa Rica dans le décret 5904-G, en fixant les limites de la réserve indigène de Guatuso. C’est pourquoi toute variation au détriment de sa superficie d’origine serait contraire aux dispositions de l’art. 11 de la convention internationale ratifiée par le Costa Rica.»

En conclusion, la Cour suprême du Costa Rica a appliqué la convention n° 107 de l’OIT qui reconnaît le droit de propriété des populations indigènes sur le territoire qu’elles occupent traditionnellement. Le décret de l’Exécutif par lequel la taille de la réserve d’indigènes était réduite a, sur ce fondement, été écarté pour violation d’une norme juridique de valeur supérieure et pour atteinte aux droits fondamentaux desdites populations.


1 Convention (n° 107) de l’OIT relative aux populations arborigènes et tribales, 1957 ; Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 1966.

2 Article 3 de la convention n° 107: «Des mesures spéciales devront être adoptées pour protéger les institutions, les personnes, les biens et le travail des populations intéressées aussi longtemps que leur situation sociale, économique et culturelle les empêchera de jouir du bénéfice de la législation générale du pays auquel elles appartiennent.»

Texte intégral de la décision