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Cour suprême d’Estonie, Chambre de révision constitutionnelle, 27 mai 1998, n° 3-4-1-4-98

Constitution de l’Estonie

Article 3, paragraphe 1

Le pouvoir exercé par le gouvernement doit être uniquement mis en œuvre sur le fondement de la Constitution et des lois conformes à celle-ci. Les principes et normes de droit international universellement reconnus font partie intégrante du système juridique estonien.

Article 123

La République d’Estonie ne peut conclure de traités internationaux en conflit avec la Constitution.

Si les lois estoniennes ou d’autres actes sont en contradiction avec des traités internationaux ratifiés par le parlement, les articles du traité international doivent être appliqués.

Pays:
Estonie
Sujet:
Gens de mer
Type d’utilisation du droit international:
Résolution directe du litige sur le fondement du droit international
Type d’instruments utilisés:

traité ratifié1

Obligation pour les gens de mer étrangers d’être en possession d’un document administratif estonien pour travailler sur un navire de ce pays/ Saisine de la Chambre de révision constitutionnelle pour contrariété avec la convention n° 108 de l’OIT/ Application directe de la convention n° 108 de l’OIT.

La réglementation en vigueur en Estonie2 prévoyait que les marins étrangers désirant travailler sur des navires battant pavillon estonien devaient se voir délivrer un certificat d’enregistrement de service. Bien que légalement rentrés à bord de navires en Estonie, ils ne pouvaient pas sortir du territoire sur un bateau estonien sans ce document. La Cour administrative de Tallin avait estimé que cette réglementation était contraire au principe constitutionnel de libre choix de la profession, au principe d’égalité de traitement entre les citoyens nationaux et étrangers, ainsi qu’à la convention n° 108 de l’OIT sur les pièces d’identité de gens de mer. La Cour administrative a soumis la constitutionnalité de la réglementation au jugement de la Cour suprême.

La Chambre de révision constitutionnelle de la Cour suprême a examiné les dispositions de la réglementation et les a comparées à celles de la convention n° 108 de l’OIT:

«Le traitement inégal des étrangers (…) n’est pas en conformité avec l’article 5 de la convention n° 108, selon lequel tout marin qui est porteur d’une pièce d’identité des gens de mer valable, délivrée par l’autorité compétente d’un territoire pour lequel la présente convention est en vigueur, sera réadmis dans ledit territoire, indépendamment du fait qu’il ou elle ait ou n’ait pas été inscrit dans la liste d’équipage d’un navire battant drapeau estonien.

Selon l’article 6 de la convention, tout membre autorisera l’entrée d’un territoire, pour lequel la présente convention est en vigueur, à tout marin en possession d’une pièce d’identité des gens de mer valable, lorsque cette entrée est sollicitée pour une permission à terre de durée temporaire pendant l’escale du navire.

Cette convention ne réglemente pas les problèmes relatifs au fait de quitter le territoire d’un État membre. Ce droit, surtout s’il est lié au fait de monter à bord, est implicite et procède de l’objectif de la convention, c’est-à-dire de simplifier les formalités relatives aux voyages des marins que ce soit pour rejoindre les navires ou à bord de ceux-ci.»

La Cour suprême d’Estonie s’est fondée sur l’objectif de la convention n° 108 pour estimer que les dispositions de cette dernière devaient non seulement régir le droit d’entrer dans un État partie à la convention, mais aussi celui d’en sortir. La Constitution nationale prévoyant que les traités ratifiés ont une valeur supérieure à la loi, la juridiction a confirmé la décision de la Cour administrative de Tallin et a déclaré le règlement incriminé inconstitutionnel.


2 Règlement (n° 414) du gouvernement de la République du 3 novembre 1994: Amendements partiels au règlement n° 268 du gouvernement de la République du 16 septembre 1992.

Texte intégral de la décision