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Cour nationale de justice de Papouasie-Nouvelle-Guinée, Sukuramu c. New Britain Palm Oil Ltd, 16 février 2007, [2007] PGNC 21; N3124

Constitution de l’État indépendant de Papouasie-Nouvelle-Guinée

Article 117 (7)

Nonobstant le consentement de la Papouasie-Nouvelle-Guinée à être partie à un traité, aucun traité ne fera partie de la législation nationale de la Papouasie-Nouvelle-Guinée sauf si, et uniquement dans la mesure où, un traité reçoit le statut de loi nationale en vertu d’une loi constitutionnelle ou d’un acte du Parlement.

Pays:
Papouasie-Nouvelle-Guinée
Sujet:
Licenciement
Type d’utilisation du droit international:
Création par le juge d’un principe inspiré du droit international
Type d’instruments utilisés:

Traité ratifié1

Plainte pour licenciement abusif Règle inspirée du « common law » selon laquelle un employeur peut engager et licencier à volonté/ Considération du devoir de la Cour nationale de développer le droit sous-jacent en un système cohérent/ Formulation d’une nouvelle règle de droit dans le cadre du droit sous-jacent/ Création d’un principe inspiré du droit international

Le plaignant travaillait comme charpentier pour New Britain Palm Oil en vertu d’un contrat écrit. À la suite d’une dispute avec son superviseur, au cours de laquelle il aurait menacé le superviseur de violences physiques et endommagé des biens de l'employeur, le travailleur fut licencié pour mauvaise conduite.

Le travailleur entama une procédure contre l’employeur, alléguant qu’il avait été licencié sans cause juste et contrairement aux principes de justice naturelle, car il n’avait pas eu la possibilité de se faire entendre par son employeur avant d’être licencié.

La Cour nota que tous les contrats de travail contenaient des conditions explicites et implicites. La Cour observa que la règle appliquée auparavant (dans le cadre du droit sous-jacent en Papouasie-Nouvelle-Guinée) était que le droit d’être entendu avant le licenciement n’était pas une condition implicite du contrat de travail; en d’autres termes, la position du common law était que l’employeur peut embaucher et licencier à volonté, avec ou sans motif valable et sans donner au travail le droit d'être entendu.

La Cour nota que si elle était liée par la jurisprudence de la Cour suprême dans laquelle la règle « engager et licencier à volonté » avait été appliquée, la loi sur le droit sous-jacent de 2000 (Underlying Law Act) l’obligeait à s’assurer que le droit sous-jacent s’était développé en un système cohérent d’une manière appropriée aux circonstances du pays.2

Dans ce contexte, la Cour déclara que, à son avis, la règle « engager et licencier à volonté » règle n’était plus considérée comme appropriée aux circonstances du pays, car elle était « défavorable au développement du droit sous-jacente en un système cohérent d’une manière appropriée aux circonstances du pays. »3

La Cour observa que d’autres pays qui avaient préalablement adhéré à la règle « engager et licencier  à volonté » l’avaient « abandonnée ou substantiellement modifiée au moyen d’une loi »4 et nota:

« Cette tendance est illustrée par une convention de l’Organisation internationale du Travail à laquelle la Papouasie-Nouvelle-Guinée est partie, à savoir la convention (n° 158) sur le licenciement, 1982. L’OIT est une institution spécialisée des Nations Unies. Elle vise à la promotion de la justice sociale et des droits humains et sociaux internationalement reconnus (...) La Papouasie-Nouvelle-Guinée est membre de l’OIT depuis 1976. Elle a ratifié 26 conventions de l’OIT, dont la convention n° 158, ratifiée le 2 juin 2000.

La convention sur le licenciement s’applique à toutes les branches d’activité économique et à toutes les personnes employées. Elle établit des normes internationales en matière de cessation d’emploi à l’initiative de l'employeur. Elle promeut le principe que le licenciement doit être justifié, que la décision de mettre fin à la relation d’emploi doit être prise de façon équitable et qu’il y ait un droit de recours contre le licenciement injustifié. »5

La Cour fit référence à l’article 117 (7) de la Constitution, qui stipule qu’aucun traité ne fera partie de la législation nationale de la Papouasie-Nouvelle-Guinée sauf si, et uniquement dans la mesure où, un traité reçoit le statut de loi nationale en vertu d’une loi constitutionnelle ou d’un acte du Parlement. La Cour nota qu’aucune loi constitutionnelle ni aucun acte du Parlement n’avait donné à la convention n° 158 de l’OIT le statut de loi nationale, et donc que la question de savoir si ses dispositions avaient été violées ne pouvait être considérée par la justice.

La Cour observa toutefois au sujet de la convention n° 158 de l’OIT:

« …, sa signification est ailleurs. La Papouasie-Nouvelle-Guinée est partie à la convention et elle a l’obligation en droit international de promulguer des lois pour y donner effet, sauf dans la mesure où il y est donné effet d’une autre manière, y compris par des décisions de justice. Si je formule une règle de droit, en tant que décision de justice, qui donne effet à la convention n° 158 de l’OIT, j’aiderai la Papouasie-Nouvelle-Guinée à s’acquitter de ses obligations de droit international. Je vais développer le droit sous-jacent d’une manière conforme à ces obligations. Le droit national de la Papouasie-Nouvelle-Guinée sera mis en conformité avec les normes internationales.6

La Cour estima que la règle « engager et licencier à volonté » était en contradiction avec l’article 7 de la convention n° 158 de l’OIT et qu’elle « devait donc être abolie » dans le droit national de la Papouasie-Nouvelle-Guinée.7

Ayant établi un principe jurisprudentiel fondé sur la convention n° 158, la Cour statua que, dans ce cas, l’employeur avait violé le contrat de travail en ne lui accordant pas le droit d’être entendu. La Cour ordonna qu’un procès ait lieu sur l’évaluation des dommages et intérêts à accorder au travailleur.


1 Convention (n° 158) sur le licenciement, 1982.

2 Article 5, Underlying Law Act 2000.

3 Paragraphe 96 de la décision.

4 Paragraphe 123 de la décision. La Cour fit spécifiquement référence à l’Australie, au Canada et à la Nouvelle-Zélande.

5 Paragraphes 124 et 125 de la décision.

6 Paragraphes 135 et 136 de la décision.

7 Paragraphe 137 de la décision.

Texte intégral de la décision