Cour constitutionnelle, Juan José Gorriti et plus de cinq mille citoyens c. Congrès national, 12 août 2005, affaire n° 008-2005-PI/TC
Constitution du Pérou
Article 3
L’énumération des droits établis à ce chapitre ne porte pas préjudice aux autres droits garantis par la Constitution, ni à ceux de nature analogue ou basés sur la dignité de l’être humain ou sur les principes de souveraineté du peuple, de l’État démocratique de droit et de la forme républicaine de gouvernement.
Article 55
Les traités ratifiés par l’État et en vigueur font partie du droit national.
Article 56
Les traités doivent être approuvés par le Congrès avant leur ratification par le Président de la République, chaque fois qu’ils traitent des matières suivantes:
1. Droits de la personne; 2. Souveraineté, frontières ou intégrité de l’État; 3. Défense nationale; 4. Obligations financières de l’État.
Article 57, paragraphe 2
Lorsque le traité affecte des dispositions constitutionnelles, il doit être approuvé par le biais de la même procédure régissant la réforme de la Constitution, avant d’être ratifié par le Président de la République.
Disposition finale transitoire n° 4
Les normes relatives aux droits et libertés que la Constitution reconnaît sont interprétées en conformité avec la Déclaration universelle des droits de l’homme et avec les traités et accords internationaux traitant des mêmes matières ratifiés par le Pérou.
Loi Péruvienne sur les procédures du travail (n ° 29497 de 2010)
Disposition supplémentaire n° 10
En vertu de la quatrième disposition finale et transitoire de la Constitution politique du Pérou, les droits sociaux, individuels et collectifs doivent être interprétés en conformité avec la Déclaration universelle des droits de l’homme et avec les traités et accords internationaux en la matière ratifiés par le Pérou, sans préjudice de la consultation des avis des organes de contrôle de l’Organisation internationale du Travail (OIT) et des opinions ou décisions adoptés par les tribunaux internationaux constitués selon des traités auxquels le Pérou est partie.
Pérou
Droit de grève , Liberté syndicale , Négociation collective
Résolution directe du litige sur le fondement du droit international
Traités ratifiés1
Liberté syndicale/ Négociation collective/ Droit de grève/ Résolution directe du litige sur le fondement du droit international
Dans cette action en inconstitutionnalité contre la loi n° 28175 «loi-cadre de la fonction publique», les requérants alléguèrent que ladite loi contrevenait à la Constitution péruvienne, dans la mesure où son article 15 n’énumérait pas, parmi les droits des fonctionnaires publics, les droits syndical, de négociation collective et de grève. Pour sa défense, le Congrès national allégua que le fait que la loi n’énumérait pas ces droits ne signifiait pas qu’elle les ignorait, étant donné que ces droits sont reconnus dans la Constitution et les conventions internationales.
La Cour conclut qu’il n’existait pas de violation des normes constitutionnelles. Aux yeux de la Cour, les droits reconnus par la loi n° 28175 n’étaient pas exhaustifs et n’impliquaient pas l’ignorance des droits reconnus dans d’autres dispositions légales. Pour étayer ses arguments, la Cour se fonda sur des normes nationales et internationales, notamment la convention n° 87 de l’OIT, lesquelles font partie, aux termes de la Constitution, de l’ordre juridique. À cet égard, la Cour signala que:
«De même, conformément à la quatrième disposition finale et transitoire de la norme suprême, les traités internationaux en matière de droits de l’homme devront être appliqués pour l’interprétation des droits et libertés consacrés par la Constitution en matière de travail. En effet, les droits du travail des fonctionnaires mentionnés par les requérants devront être interprétés conformément aux dispositions de l’article 9 de la convention n° 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical et de l’article 8 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, (…) entre autres.»2
Dans le cas spécifique du droit de négociation collective, la Cour signala que ledit droit était soumis à des limites, ce qui est reconnu par la convention n° 151 de l’OIT. Dans le cas péruvien, la négociation collective de l’État avec les fonctionnaires publics était limitée pour des raisons budgétaires:
«L’article 7 de ladite convention (n° 151) stipule que des mesures appropriées aux conditions nationales doivent, si nécessaire, être prises pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures permettant la négociation des conditions d'emploi entre les autorités publiques intéressées et les organisations d'agents publics (…). En effet, dans les conditions nationales auxquelles la convention n° 151 fait référence, la Constitution établit certaines normes liées au budget public (…). Pour cette raison, dans le cas des négociations collectives des fonctionnaires publics, elles devront s’effectuer en tenant compte de la limite constitutionnelle qu’impose un budget équilibré et équitable.»3
En conclusion, sur la base de la convention n° 87 de l’OIT, la Cour détermina que la loi permettait l’exercice des droits d’association, de grève et de négociation collective aux fonctionnaires publics; bien que le droit de négociation soit soumis à des limites constitutionnelles, lesquelles étaient conformes aux dispositions de la convention n° 151 de l’OIT.
1 Convention (n° 87) de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; convention (n° 151) de l’OIT sur les relations du travail dans la fonction publique, 1978.