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Cour constitutionnelle, deuxième chambre, Cámara Peruana de la Construcción-CAPECO s/ recours extraordinaire, 26 mars 2003

Constitution du Pérou

Article 3

L’énumération des droits établis à ce chapitre ne porte pas préjudice aux autres droits garantis par la Constitution, ni à ceux de nature analogue ou basés sur la dignité de l’être humain ou sur les principes de souveraineté du peuple, de l’État démocratique de droit et de la forme républicaine de gouvernement.

Article 55

Les traités ratifiés par l’État et en vigueur font partie du droit  national.

Article 56

Les traités doivent être approuvés par le Congrès avant leur ratification par le Président de la République, chaque fois qu’ils traitent des matières suivantes:

1. Droits de la personne; 2. Souveraineté, frontières ou intégrité de l’État; 3. Défense nationale; 4. Obligations financières de l’État.

Article 57, paragraphe 2

Lorsque le traité affecte des dispositions constitutionnelles, il doit être approuvé par le biais de la même procédure régissant la réforme de la Constitution, avant d’être ratifié par le Président de la République.

Disposition finale transitoire n° 4

Les normes relatives aux droits et libertés que la Constitution reconnaît sont interprétées en conformité avec la Déclaration universelle des droits de l’homme et avec les traités et accords internationaux traitant des mêmes matières ratifiés par le Pérou.

Loi Péruvienne sur les procédures du travail (n ° 29497 de 2010)

Disposition supplémentaire n° 10

En vertu de la quatrième disposition finale et transitoire de la Constitution politique du Pérou, les droits sociaux, individuels et collectifs doivent être interprétés en conformité avec la Déclaration universelle des droits de l’homme et avec les traités et accords internationaux en la matière ratifiés par le Pérou, sans préjudice de la consultation des avis des organes de contrôle de l’Organisation internationale du Travail (OIT) et des opinions ou décisions adoptés par les tribunaux internationaux constitués selon des traités auxquels le Pérou est partie.

Pays:
Pérou
Sujet:
Négociation collective
Type d’utilisation du droit international:
Création par le juge d’un principe inspiré du droit international
Type d’instruments utilisés:

Traité ratifié1

Amparo/ Négociation collective/ Constitution nationale/ Création par le juge d’un principe inspiré du droit international

La Chambre péruvienne de la construction (CAPECO) introduisit un recours constitutionnel en amparo contre le ministère du Travail afin d’obtenir une déclaration d’inapplicabilité des règles administratives imposant aux employeurs la négociation collective au niveau de la branche d’activité dans le secteur de la construction civile, sa prétention consistant à négocier au niveau de l’entreprise ou du chantier.

Le ministère du Travail répondit en faisant valoir que la négociation collective dans le secteur de la construction civile devait être réglementé en tenant compte des particularités du secteur, et notamment que: a) les travailleurs qualifiés dans les métiers de la construction ne passent pas d’une branche à l’autre, et b) l’exécution des travaux est de nature temporaire, et par conséquent on relève un taux élevé de rotation entre les différentes sociétés et les chantiers, ce qui empêche les travailleurs d’avoir un syndicat à l’échelle de l’entreprise ou du chantier.

Analysant le fond de l’affaire, la Cour constitutionnelle commença par noter la base normative applicable au règlement du litige, qui réside dans la Constitution et la convention n° 98 de l’OIT. Sur ce dernier point, la Cour précisa que:

« l’article 4 de la convention n° 98 constitue un principe herméneutique fondamental auquel il faut se référer pour comprendre l’essence de la négociation collective, en prenant toujours en considération le fait que l'un de ses principaux objectifs est d'améliorer la vie et les conditions de travail de ses bénéficiaires ».2

et signala que la Constitution intègre le mandat de la convention nº 98 de l’OIT en ce sens qu’elle déclare que l’État s’engage à développer et à promouvoir la négociation collective.

Vu que la négociation collective est souhaitée et encouragée par l’État, il s’agissait de décider du genre de négociation préférable pour chaque partie dans cette affaire, sachant que chaque partie souhaitait une négociation différente: l’employeur au niveau de l’entreprise ou du chantier, et le syndicat au niveau de la branche d’activité. À cet égard, il existait une contradiction à l’intérieur même du décret-loi 25 563 sur les relations collectives de travail.

La Cour analysa la question comme suit: le décret-loi 25 563 indique à l’article 45, deuxième paragraphe, que si une convention existe à un niveau donné, pour en conclure une autre à un autre niveau, qui revêt un caractère substitutif ou complémentaire, il faut obtenir l’accord des parties, la nouvelle convention ne pouvant être établie par une action administrative ou une sentence arbitrale. Ainsi, les partenaires sociaux du secteur de la construction civile ayant déjà négocié au niveau de la branche d’activité, conformément à l’article 45 du décret-loi 25 563, ce niveau de convention collective entre les parties devait être maintenu, sauf accord contraire entre les parties. Cependant, la troisième disposition transitoire du décret-loi 25 563 prévoit que, pour les négociations en cours au niveau de la branche d’activité, les parties devaient confirmer expressément dans l’accord qu’elles continuaient à négocier à ce niveau ou, dans le cas contraire et si aucun accord n’était trouvé, que la négociation collective se déroulerait au niveau de l’entreprise.

Face à la nécessité de désamorcer ce conflit d'interprétation, la Cour envisagea les deux solutions possibles: promouvoir la négociation collective au niveau de la branche d’activité ou la promouvoir au niveau de l’entreprise ou du chantier. Compte tenu de la situation particulière du secteur de la construction civile, la Cour fit remarquer que, dans certaines circonstances, le fait de procéder à une distinction est en soi un acte de justice qui reconnaît une situation de fait exigeant une telle différenciation. Dans le cas de la construction civile, et compte tenu de ses caractéristiques, la négociation collective ne peut être efficace que lorsqu’elle a lieu au niveau de la branche d’activité. Et, l’État devant encourager et promouvoir la négociation collective en application de la Constitution et de la convention n° 98 de l’OIT, la Cour valida les actions du ministère du Travail et imposa la négociation collective au niveau de la branche d’activité dans le secteur de la construction civile.


2 Article 4 de la convention n° 98: « Des mesures appropriées aux conditions nationales doivent, si nécessaire, être prises pour encourager et promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d’employeurs d'une part, et les organisations de travailleurs d’autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d’emploi. »

Texte intégral de la décision