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Tribunal du travail de première instance du District judiciaire sud, Susana Elena Ordóñez c. Gouvernement de la Province de Terre de Feu, concernant un contentieux administratif relatif à un accident, 29 août 2000, arrêt interlocutoire n° 787

Constitution nationale de l’Argentine

Article 31

La présente Constitution, les lois de la Nation adoptées en sa conséquence par le Congrès et les traités signés avec les puissances étrangères forment la loi suprême de la Nation; les autorités de chaque province sont tenues de s’y conformer, nonobstant toute disposition contraire contenue dans les lois ou constitutions provinciales sauf, pour la province de Buenos Aires, les traités ratifiés après le Pacte du 11 novembre 1859. 

Article 75, paragraphe 22

(…) Les traités et concordats possèdent un rang supérieur aux lois. Dans leurs conditions d’application, la Déclaration américaine des droits et devoirs de l’homme; la Déclaration universelle des droits de l’homme; la Convention américaine relative aux droits de l’homme; le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels; le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et son protocole facultatif; la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide; la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale; la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes; la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et la Convention relative aux droits de l’enfant ont rang constitutionnel, ne dérogent à aucun article de la première partie de la présente Constitution et doivent être considérés complémentaires des droits et garanties reconnus par celle-ci. (…)

Pays:
Argentine
Sujet:
Principe général d’égalité
Type d’utilisation du droit international:
Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Type d’instruments utilisés:

Traité ratifié1

Accès à la justice/ Principe d’égalité/ Loi établissant le paiement de frais de justice pour les travailleurs de la fonction publique/ Principe constitutionnel de gratuité et garantie de l’égalité/ Interprétation de garanties constitutionnelles à la lueur du droit international pour clarifier la définition d’un terme

La demanderesse invoqua l’inconstitutionnalité d’une loi2 obligeant les travailleurs de la fonction publique à payer des frais de justice en cas de plainte contre leur employeur, signalant que cette disposition violait la Constitution provinciale3, qui consacre, en tant que garantie en faveur des travailleurs, la gratuité des procédures administratives ou judiciaires de nature sociale, professionnelle ou syndicale.

Pour déterminer si la loi violait la Constitution provinciale, le Tribunal du travail de première instance analysa la disposition constitutionnelle reconnaissant le principe de gratuité de l’accès à la justice afin de voir si cette dernière s’applique également aux travailleurs de la fonction publique. À cet effet, le tribunal se référa à la convention n° 151 de l’OIT pour interpréter le sens du terme «travailleur» utilisé dans la disposition constitutionnelle.

Le Tribunal considéra qu’il ressortait cette interprétation que, quand le principe de gratuité concerne le travailleur, il n’y a pas de différence entre un travailleur de la fonction publique et un travailleur du secteur privé, en ce sens que la gratuité des procédures judiciaires concerne les deux catégories de travailleurs, et donc que les fonctionnaires ne doivent pas être exclus de cet avantage.

En effet, le Tribunal décida que «(…) l’alinéa 9 de l’article 16 de la Constitution provinciale s’applique aux travailleurs des deux secteurs, le mot «social» devant toutefois s’entendre dans ce cas comme faisant référence à des questions liées à l’emploi des travailleurs dépendants en vertu soit d’un contrat de travail, soit d’un contrat d’emploi public, et non aux cas régis exclusivement par le droit du travail. Cette interprétation coïncide avec l’utilisation du terme «travailleur» par l’Organisation internationale du travail, qui ne fait la distinction entre les travailleurs de la fonction publique et ceux du secteur privé que dans des cas ponctuels requérant un traitement distinct ou exprès en raison de particularités dérivant de la nature juridique de l’employeur (voir la convention n° 151)».

Interprétant la Constitution provinciale à la lueur de la convention n° 151 de l’OIT, le Tribunal du travail du District judiciaire sud signala que le bénéfice de la gratuité de l’accès à la justice s’appliquait tant aux travailleurs de la fonction publique qu’à ceux du secteur privé, raison pour laquelle il déclara l’inconstitutionnalité de la loi établissant le paiement de frais pour les travailleurs de la fonction publique.


2 Article 41 de la Loi n° 460 du 27 janvier 1999 sur les frais de justice.

3 Article 16 9) de la Constitution provinciale: «Le travail est un droit et un devoir social; il constitue le moyen légitime et indispensable pour satisfaire aux besoins spirituels et matériels de l’individu et de la communauté. La Terre de Feu, l’Antarctique et les îles de l’Atlantique sud constituent une province fondée sur le travail et, en tant que telle, reconnaissent à tous leurs habitants les droits suivants: gratuité de l’ouverture de procédures administratives ou judiciaires de nature sociale, professionnelle ou syndicale.»

Texte intégral de la décision