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Cour suprême de la République de Philippines, UST Faculty Union et autres c. Dir Benedicto Ernesto R. Bitonio, Jr, et autres, 16 novembre 1999, G.R. n° 131235

Constitution des Philippines

Article 2, section 2

Les Philippines refusent la guerre comme instrument de politique nationale, acceptent les principes internationaux universellement reconnus comme faisant partie de la loi interne et adhèrent à une politique de paix, égalité, justice, liberté, coopération, et amitié avec tous les pays.

Pays:
Philippines
Sujet:
Liberté syndicale
Type d’utilisation du droit international:
Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Type d’instruments utilisés:

Traité ratifié1

Violation des règles prévues par les statuts d’un syndicat pour élire ses représentants/ Contestation d’une décision administrative ayant invalidé cette élection/ Portée du droit de s’organiser librement/ Interprétation du droit national à la lumière du droit international

Des membres d’un syndicat contestaient l’élection de leurs représentants. Ils estimaient que la procédure suivie n’était pas conforme à celle prévue par les statuts du syndicat. Ils saisirent un arbitre qui indiqua que l’élection des représentants était invalide. Cette décision fut confirmée par l’autorité compétente du Ministère du travail. Les syndicalistes élus comme représentants contestaient cette décision. Selon eux, l’invalidation des résultats d’une élection par une autorité extérieure au syndicat était contraire au droit de s’organiser librement.

La Cour suprême a tenu à clarifier la portée du droit de s’organiser librement. Elle a rappelé les fondements juridiques de ce principe ainsi que les droits et devoirs en découlant pour les membres d’un syndicat. Pour cela, la Cour a intégré dans sa décision l’extrait d’un jugement dans lequel le juge avait interprété le droit national à la lumière de la convention n° 87 de l’OIT:

«Le droit constitutionnel de s’organiser librement est plus compréhensible dans le contexte de la convention n° 87 de l’OIT (liberté d’association et protection du droit syndical), dont les Philippines sont un des États signataires. L’article 3 de la convention prévoit que les organisations de travailleurs ont le droit d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d’élire librement leurs représentants en toute liberté et sans interventions des autorités publiques. La liberté conférée par ces dispositions est expansive. La responsabilité imposée aux membres du syndicat de respecter les statuts et les règles qu’ils ont eux-mêmes établies l’est également. Il faut souligner que les statuts du syndicat constituent la loi fondamentale qui gouverne les relations entre ses membres. C’est dans ces statuts que sont définis les droits, devoirs, obligations, pouvoirs, fonctions et autorités des membres et des responsables. Il s’agit de la loi organique qui détermine la validité des actes effectués par un responsable ou un membre du syndicat. Sans respect de ses statuts, le syndicat est soumis, comme toute institution démocratique, au péril de dégénérer en un groupe uniquement gouverné par la loi du rassemblement.»

Cette référence à la convention n° 87 de l’OIT a permis à la Cour suprême des Philippines de souligner la valeur impérative des règles contenues dans les statuts d’un syndicat. Sur ce fondement, la Cour a estimé que puisque les règles prévues pour l’élection des représentants du syndicat n’avaient pas été respectées, l’administration avait eu raison d’invalider leur élection et que cette décision ne remettait pas en cause le droit de s’organiser librement2.


2 Le Comité de la liberté syndicale s’est prononcé sur la question de l’invalidation de la part d’une autorité administrative des élections d’un syndicat (BIT: La liberté syndicale, Recueil de décisions et de principes du comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du BIT, cinquième édition (révisée), Genève, 2006) :

Paragraphe 431: «En relation avec un conflit interne entre deux directions rivales au sein d’une organisation syndicale, le comité a rappelé que, pour garantir l’impartialité et l’objectivité de la procédure, il importe que le contrôle des élections syndicales soit le fait des autorités judiciaires compétentes.»

Paragraphe 440: «Des mesures prises par les autorités administratives en cas de contestation de résultats électoraux risquent de paraître arbitraires. Pour cette raison, et aussi pour garantir une procédure impartiale et objective, les affaires de ce type devraient être examinées par les autorités judiciaires.»

Paragraphe 443 : « Afin d’éviter le danger d’une limitation sérieuse au droit des travailleurs d’élire leurs représentants en toute liberté, les recours introduits devant les tribunaux par les autorités administratives contre les résultats des élections syndicales ne devraient pas – en attendant le résultat de la procédure – paralyser le fonctionnement des organisations syndicales. »

Texte intégral de la décision