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Cour fédérale australienne, Konrad c. Police de Victoria et autres, 6 août 1999, [1999] FCA 988

Pays:
Australie
Sujet:
Licenciement
Type d’utilisation du droit international:
Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Type d’instruments utilisés:

Traité ratifié;1 jurisprudence étrangère2

Recours d’un policier pour licenciement injustifié/ Interprétation du terme “employé” inclus dans la législation nationale à la lumière d’instruments juridiques internationaux et de jurisprudences étrangères

Un policier avait saisi la justice pour faire reconnaître le caractère injustifié de son licenciement. Il alléguait que celui-ci violait l’article 170 DE de la loi de 1988 sur les relations industrielles (Cth) (ci-après la Loi).

Pour statuer sur ce recours, la Cour fédérale australienne a examiné si l’article 170 DE de la Loi3 était applicable en l’espèce, c’est-à-dire si le terme «employé», tel qu’inclus dans cet article, englobait les policiers. Pour rendre sa décision, la Cour s’est référée à l’instrument international à l’origine de l’adoption de cette loi, la convention n° 158 de l’OIT sur le licenciement, de même qu’à des jurisprudences étrangères.

La Cour a d’abord rappelé que la division 3 de la Loi [celle où est inclus l’article 170 DE] avait été adoptée pour mettre en application la convention n° 158 et la recommandation n° 166 de l’OIT sur le licenciement et, qu’en conséquence, elle devait être interprétée à la lumière de celles-ci:

«La division 3 a été adoptée dans le but de mettre en œuvre la convention n° 158 et la recommandation n° 166 de l’OIT. Lorsqu’une loi rend effectif un traité, le fait que le Parlement ait pour intention de donner à une disposition le même effet que celui qu’elle possède dans ce traité est un principe d’interprétation (…). Ce principe est spécifiquement inclus dans la Loi par l’article 170 CB qui énonce qu’une expression inclue dans cette division a la même signification que celle qu’elle possède dans la convention. Par conséquent, pour déterminer si un policier est un employé au sens de la division 3 (de la Loi), il est pertinent, en premier lieu, de déterminer si en vertu de l’interprétation qui est faite de la convention n° 158 de l’OIT, un policier est un employé au sens de celle-ci.»4

Pour déterminer si un policier était un employé au sens de cette convention, la Cour a limité son analyse «au sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte»5. En effet, les juges n’ont pas eu recours à des moyens complémentaires d’interprétation (travaux préparatoires et/ou précisions sur le sens et la portée de ce texte éventuellement émises par les organes de contrôle de l’OIT), ceux-ci considérant que l’analyse des dispositions de la convention leur permettait de déterminer clairement le sens du terme «employé», tel qu’utilisé dans celle-ci6.

«Il ne fait pas de doute que la convention s’applique tant aux employés du secteur public qu’à ceux du secteur privé. (…) Si on se réfère au texte de la convention, sans avoir recours aux travaux préparatoires, les termes de l’article 2 1) sont suffisamment généraux pour inclure les employés du secteur public: l’expression «tous les travailleurs salariés» inclut les employés du secteur public. Le contexte confirme cette interprétation. Le contexte comprend l’existence d’une disposition excluant des catégories de travailleurs au sujet desquelles se posent des «problèmes particuliers» (article 2 5)) et le fait que les normes d’application générale (établies dans la partie 2 la convention) sont applicables tant aux employés du secteur public qu’à ceux du secteur privé.»7

Puis, la Cour a déterminé «qu’à partir du moment où il est établi que la convention inclut les employés du secteur public (à moins qu’ils n’en soient spécifiquement exclus) il s’ensuit qu’elle inclut également les policiers, en tant que catégorie d’employés du secteur public.»8 Par la suite, pour soutenir son argumentation à l’effet que les policiers étaient inclus dans le terme «employés», tel qu’utilisé dans la Loi, elle s’est notamment appuyée sur diverses jurisprudences américaines9 et canadiennes10 concernant des lois similaires.

L’utilisation de la convention n° 158 de l’OIT comme outil d’interprétation a permis à la Cour fédérale de préciser que la législation nationale australienne sur le licenciement s’appliquait bien aux policiers. 


1 Convention n° (158) de l’OIT sur le licenciement, 1982.

2 Canada et États Unis.

3 Article 170 DE de la Loi: «Un employeur ne peut mettre un terme à la relation de travail sans qu’il existe un ou plusieurs motifs valides à ce sujet ou que celui-ci soit lié à l’aptitude ou à la conduite du travailleur ou fondé sur les nécessités du fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service.»

4 Juge Finkelstein, paragraphe 71 de la décision.

5 Article 31 1) de la Convention de Vienne sur le droit des traités.

6 Pour procéder ainsi, les juges se sont appuyés sur les principes d’interprétation des articles 31 et 32 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. Voir les paragraphes 72 à 77 de la décision.

7 Juge Finkelstein, paragraphe 76 de la décision.

8 Juge Finkelstein, paragraphe 78 de la décision. Il est à noter que les juges Ryan et North ont approuvé l’argumentation du juge Finkelstein.

9 Voir les paragraphes 90 à 93 de la décision.

10 Voir les paragraphes 94 à 99 de la décision.

Texte intégral de la décision